Devenir comme un enfant (Mt 19.14)

On raconte l’histoire du patron d’une grande entreprise multinationale qui cherchait un successeur. Son entreprise était en pleine croissance et il allait bientôt partir à la retraite. Il cherchait un homme ou une femme de confiance pour le remplacer, quelqu’un qui possèderait les mêmes valeurs que lui. Même s’il était très riche et puissant dans le monde du commerce, il tenait à avoir une bonne éthique, à être honnête et à bien traiter ses employés. Il n’aimait pas les magouilles, les pots de vin ou les arnaques. Il paraît que ce genre de personne est de plus en plus rare, c’est pour cela qu’il voulait choisir lui-même son successeur.

Après plusieurs sélections de candidats et plusieurs entretiens d’embauche, trois personnes ont retenu son attention. La dernière étape de l’embauche consistait à s’entretenir avec ces trois candidats en même temps.

Parmi eux, il y avait une jeune femme, surdouée, de tout juste 23 ans. À son âge, elle avait déjà plusieurs diplômes dans les domaines du commerce, du management et du marketing. Le deuxième candidat était un homme plus âgé, 39 ans. Il n’avait pas autant de diplômes que la jeune femme, mais il avait beaucoup d’expérience. Et le troisième candidat était un jeune de 18 ans, tout juste sorti d’un lycée professionnel, sans expérience, sans autre diplôme, avec un parcours scolaire classique. Il n’était pas plus doué que la majorité des jeunes de son âge. Il avait postulé pour ce poste parce que l’offre d’emploi ne précisait rien sur les compétences à avoir. C’était juste écrit : « Cherche homme ou femme de confiance pour succéder à la tête d’une entreprise de commerce ». En tombant sur cette annonce, il s’est dit : « Pourquoi pas… ? Pour une fois que rien n’est exigé au niveau des diplômes ou des années d’expérience… »

 Le jour de l’entretien final arriva. Les trois candidats étaient stressés, le cours de leur vie pouvait complètement changer grâce à ce poste. Être le patron d’une grande entreprise en pleine croissance, c’est quand même une belle opportunité de carrière. Pendant l’entretien, le patron leur demanda : « Pourquoi pensez-vous que vous êtes faits pour ce poste » ?

La première candidate a répondu : « Je possède 5 diplômes prestigieux, j’ai fait mes études dans les plus grandes écoles de commerce du monde, je parle 12 langues dont le l’anglais, l’allemand, l’espagnol, l’arabe et le chinois. J’ai toutes les compétences requises pour diriger votre entreprise et pour la développer davantage. »

En entendant cela, les deux autres candidats ont été très impressionnés. C’était maintenant au deuxième candidat de répondre :

 « Je suis diplômé de deux grandes écoles de commerce, dit-il, et j’ai enseigné le marketing à New York. J’ai une grande expérience dans le milieu. J’ai déjà eu des postes à responsabilités et j’ai aidé de grandes entreprises à se développer. Je connais bien le métier et même les méthodes de vos concurrents, ce qui est un atout non négligeable. »

Vint maintenant le tour du troisième candidat. « Pouvez-vous répéter la question ? » demanda-t-il.

Rien qu’avec cette question, les deux autres ont pensé que c’en était fini pour lui. Il n’est même pas capable de retenir une question simple. Mais le patron ne l’a pas disqualifié pour autant, il a répété la question : « Pourquoi pensez-vous que vous êtes fait pour ce poste ? »

Le jeune homme a pris encore quelques instants pour réfléchir et il a répondu : « Je suis un peu gêné par la formulation de votre question. Quoique je réponde, votre question présuppose que j’estime être fait pour ce travail, mais ce n’est pas le cas. Je ne sais pas si je suis fait pour ce poste, en revanche, je suis prêt à apprendre à vos côtés. Ensuite, c’est vous qui déciderez si vous me voulez à ce poste. »

À la fin de l’entretien, c’est ce dernier candidat que le patron a choisi ! Le jeune sans diplôme et sans expérience. Ce choix a surpris tout son entourage et ses collaborateurs. Tout le monde lui a demandé  pourquoi avoir pris ce jeune garçon sans diplôme et sans expérience ?

Il leur a répondu : « Les deux premiers candidats croyaient déjà tout savoir, et quand on connait déjà tout, on est moins disposé à apprendre. » Puis il a ajouté : « Ce que je recherche, ce ne sont pas les bonnes compétences, c’est la bonne attitude. »

Le plus important, ce ne sont pas les compétences, c’est l’attitude. Cette manière de choisir un candidat va totalement à l’encontre de ce que tout le monde aurait pu penser. De nos jours, les employeurs regardent surtout les compétences. Mais contre toute attente, ce patron-là regardait d’abord l’attitude, l’état d’esprit.

Cette histoire illustre exactement la manière dont Dieu nous considère. Voici ce que Jésus a dit quand on lui a présenté des enfants : «Laissez les petits enfants venir à moi, ne les en empêchez pas, car le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent.» Évangile selon Matthieu, chapitre 19, verset 14.

Cette parole de Jésus est surprenante. Le royaume des cieux, autrement dit, le paradis, est pour ceux qui ressemblent aux enfants. Essayez de poser la question suivante à des passants dans la rue : « Si le paradis existe, est-ce vous y entrerez ? » Beaucoup de gens répondront : oui. Et si on leur demandait : « pourquoi ? » Ils répondraient probablement : « Parce que je ne suis pas quelqu’un de mauvais, j’ai fait ce que j’ai pu pour faire le bien autour de moi. J’ai vécu de manière honnête, je n’ai pas tué et je n’ai pas volé. » Beaucoup de gens pourraient donner ce genre de réponse.

Qui aurait l’idée de répondre : « Oui moi j’irai au paradis parce que je ressemble à un enfant » ? Pas grand monde il me semble.

Tout comme le patron de notre histoire, Dieu voit les choses d’une toute autre manière. Pour entrer dans son royaume, ce qui compte, ce ne sont pas les bonnes actions, ce ne sont pas les mérites. Juste après que Jésus ait parlé des enfants, un homme s’est approché de lui en demandant : « Bon Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle?» Et voici le début de la réponse de Jésus : «Pourquoi m’appelles-tu bon? Personne n’est bon, si ce n’est Dieu seul. »

J’ai déjà rencontré des gens qui réagissent violemment à cette affirmation. Des gens qui ne croient pas en Dieu et encore moins en sa bonté à cause de toutes les souffrances qu’il y a sur terre. Je ne vais pas entrer dans ce débat concernant Dieu et la souffrance, mais j’aimerais juste relever une question.

Si l’on devait ne pas croire en Dieu à cause des souffrances de ce monde, est-ce qu’il faudrait croire en l’homme ? Est-ce que l’être humain est vraiment capable de rendre le monde meilleur ?

Selon Jésus, personne n’est bon, si ce n’est Dieu seul. C’est pour cela que si l’on compte sur notre bonté pour aller au ciel, alors ça ne marchera pas. Parce qu’on ne peut pas être bon comme Dieu est bon. Dieu nous demande de faire de bonnes œuvres, mais ce ne sont pas elles qui vont nous permettre d’aller au ciel, parce que nous ne pouvons pas être aussi bons que lui.

Pour entrer dans le royaume des cieux, Dieu nous demande de ressembler à des enfants. Mais qu’est-ce qu’il veut dire exactement ? Que veut dire : ressembler à un enfant ?

Est-ce que cela veut dire qu’il faudrait avoir l’innocence d’un enfant ? Je ne pense pas, parce qu’en fait les enfants ne sont pas si innocents que ça, en tout cas, pas toujours. Il suffit de faire un sondage auprès de parents pour se rendre compte que dès les premières années, les enfants peuvent mentir, tricher, se moquer des autres, être jaloux et même frapper d’autres enfants, et en particulier leurs frères et sœurs s’ils en ont. Jésus voulait-il dire alors qu’il faudrait être naïfs comme les enfants ?

C’est vrai que les jeunes enfants croient ce qu’on leur raconte. Par exemple, ils croient au père Noël et à la petite souris. Mais dans la Bible, Dieu ne nous demande pas d’être naïfs pour croire en lui. Il ne faut pas déconnecter notre intelligence pour avoir la foi. Dans beaucoup de versets, le croyant est invité à étudier les Écritures, à faire preuve d’intelligence et à rechercher la sagesse. Quand l’apôtre Paul prêche la Bonne Nouvelle, il utilise souvent les notions de démonstration et de raisonnement. Dieu ne nous demande pas d’être naïfs.

Quelle est donc l’attitude que Jésus aime chez les enfants ?

Nous avons la réponse juste au chapitre précédent où Jésus parle aussi des enfants. Voici ce qu’on peut lire dans l’Évangile selon Matthieu, au chapitre 18, des versets 1 à 4.

1b Les disciples s’approchèrent de Jésus et dirent: «Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux?» 2 Jésus appela un petit enfant, le plaça au milieu d’eux 3 et dit: «Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez pas et si vous ne devenez pas comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. 4 C’est pourquoi, celui qui se rendra humble comme ce petit enfant sera le plus grand dans le royaume des cieux.

Là encore Jésus répond l’inverse de qu’on aurait pu penser. Qui est le plus grand ? C’est le plus petit, dit Jésus. L’attitude que Dieu regarde avant tout, ici, c’est l’humilité.

Vous allez peut-être me dire qu’un enfant ce n’est pas toujours humble. Parfois les enfants peuvent dire des phrases du type : « C’est moi le plus fort », « C’est moi le plus beau », « C’est moi qui cours le plus vite », « C’est moi le plus grand », « C’est moi qui dessine le mieux », etc. Mais l’humilité dont il est question ici, c’est de reconnaître qu’on est petit et qu’on est dépendant. Les enfants savent qu’ils sont des enfants et non pas de grandes personnes. Les enfants savent qu’ils dépendent de leurs parents pour vivre et ils ne cherchent pas à tout prix l’indépendance. Le désir d’indépendance vient un peu plus tard, vers la pré-adolescence ou l’adolescence. L’humilité, ici, consiste à reconnaître l’entière dépendance à quelqu’un de plus grand que soi, quelqu’un qui pourvoit à ses besoins et sans qui on n’aurait rien. Sur ces points-là, sommes-nous prêts à ressembler à des enfants ?

Supportons-nous l’idée qu’il y ait un Dieu au-dessus de nous ? Un Dieu qui veut avoir un regard sur notre vie ? Acceptons-nous de croire en un Dieu qui nous dépasse et qui nous demande de lui faire confiance, d’avoir foi en lui ?

Pour revenir à l’histoire du patron et du jeune candidat, sommes-nous prêts à dire comme le jeune homme : mes compétences ne sont pas à la hauteur, mais je suis prêt à écouter le maître, à le suivre et à apprendre ? C’est cette attitude que Dieu attend de nous. C’est de cette humilité dont Jésus parle quand il dit : « le royaume des cieux est pour ceux qui ressemblent aux enfants. »

Dieu est le patron et il accepte toutes les candidatures. Changeons d’attitude, faisons preuve d’humilité, sachons être humbles devant lui, comme des enfants, et il nous ouvrira les portes de son royaume.

Christian Huy

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