Dieu et la guerre

Que penser des guerres que le peuple d’Israël a engagées dans l’Ancien Testament ? Peut-on dire que le christianisme est une cause de guerre ?

Dans cette série de prédications sur la foi et la raison, je traite les questions qui sont souvent posées aux chrétiens de la part de ceux qui ont des objections contre la foi chrétienne. J’aborde ces sujets suite à l’exhortation de l’apôtre Pierre qui nous dit : « Soyez toujours prêts à défendre l’espérance qui est en vous, devant tous ceux qui vous en demandent raison. » (1 P 3.15)

Parfois, il est difficile d’expliquer notre foi,  car c’est une question de relation et d’expérience. Mais nous sommes aussi invités à réfléchir à notre foi pour enrichir notre témoignage. Plusieurs chrétiens racontent qu’avant de faire le pas de foi, certaines questions les empêchaient de croire.

Il y a trois ans j’ai rencontré Alexis, un jeune qui a étudié la philosophie. C’était un athée convaincu, il était persuadé que Dieu n’existait pas. Mais après avoir eu des discussions avec des chrétiens, il s’est rendu compte qu’il était plus raisonnable de croire en Dieu que de ne pas y croire. Aujourd’hui il est philosophe conférencier et évangéliste. Il est engagé dans une Église en Alsace.

Il me semble qu’il vaut la peine de réfléchir aux réponses que l’on peut apporter à nos contemporains. Attention, la foi n’est pas une croyance qui vient uniquement grâce à la réflexion, mais la réflexion peut aider à franchir certains blocages. Revenons à nos questions.

Que penser des guerres que le peuple d’Israël a engagées dans l’Ancien Testament ? Cette question est souvent posée par des enfants de chrétiens qui ont reçu un enseignement biblique dans leur jeunesse. Comment un Dieu d’amour peut-il demander à son peuple d’exterminer d’autres peuples ?

La première chose à dire c’est que toutes les violences relatées dans la Bible manifestent la conséquence de la désobéissance à Dieu. Si l’être humain obéissait totalement à Dieu, il n’y aurait pas eu tous ces massacres. Le premier meurtre dans la Bible concerne Caïn et Abel. Ce sont les enfants d’Adam et Ève qui se sont détournés de Dieu. Caïn était jaloux de son frère Abel.

Et quand Caïn a imaginé tuer Abel, Dieu l’a averti. Genèse, chapitre 4, versets 6 et 7 : «Pourquoi es-tu irrité et pourquoi arbores-tu un air sombre? Certainement, si tu agis bien, tu te relèveras. Si en revanche tu agis mal, le péché est couché à la porte et ses désirs se portent vers toi, mais c’est à toi de dominer sur lui.»

Ici, Dieu recommande à Caïn de faire le bon choix. Il ne nous force pas parce qu’il ne veut pas nous traiter comme des marionnettes. Mais il nous avertit. La suite du texte raconte le premier meurtre de l’histoire : Caïn tue son frère.

Toutes les violences relatées dans la Bible sont la conséquence de la désobéissance à Dieu. Mais alors, que penser des guerres commandées par l’Éternel ? Que penser de la conquête du territoire de Canaan ? Le pays que Dieu a promis de donner à son peuple, pays qui était déjà habité.

On peut lire des récits assez troublants sur l’extermination de villes entières sur ordre de Dieu.

Par exemple, voici ce que nous pouvons lire dans le livre de Josué sur la destruction de la ville de Jéricho, au chapitre 6 versets 20 et 21 :

 « Le peuple poussa des cris et les prêtres sonnèrent de la trompette. Lorsque le peuple entendit le son de la trompette, il poussa de grands cris et la muraille s’écroula. Le peuple monta dans la ville, chacun devant soi. Ils s’emparèrent de la ville et vouèrent à la destruction, en le passant au fil de l’épée, tout ce qui s’y trouvait: hommes et femmes, enfants et vieillards, jusqu’aux bœufs, aux brebis et aux ânes. »

Ce genre de récit est assez troublant. Comment concilier un Dieu qui nous demande de nous aimer, et un Dieu qui ordonne ce genre de combats ?

Il faut prendre en compte l’ensemble de la révélation biblique. Si on se contente de tirer des extraits par-ci par-là, on peut faire dire à la Bible tout ce qu’on veut. Dès le début du livre de la Genèse, Dieu montre à Abraham le territoire de Canaan. Il lui promet que ses descendants possèderont un jour ce pays. Avant cela, ils seront esclaves en Égypte, et c’est seulement à la fin de leur esclavage qu’ils iront prendre possession de Canaan. C’est au chapitre 15 de la Genèse, les versets 13 à 16 :

13 L’Éternel dit à Abram: «Sache que tes descendants seront étrangers dans un pays qui ne sera pas à eux. On les réduira en esclavage et on les opprimera pendant 400 ans.
14 Cependant, la nation dont ils seront esclaves, c’est moi-même qui la jugerai, et ils sortiront ensuite avec de grandes richesses. 15 Quant à toi, tu iras dans la paix rejoindre tes ancêtres, tu seras enterré après une heureuse vieillesse.
16 Ce n’est qu’à la quatrième génération qu’ils reviendront ici, car la faute des Amoréens n’est pas encore à son comble.»

Ces paroles de Dieu annoncent plusieurs choses. L’esclavage en Égypte, la libération de l’esclavage, la punition des Égyptiens et la prise de possession de Canaan. Au verset 16, Dieu explique pourquoi il attend aussi longtemps pour donner Canaan aux descendants d’Abraham : « car la faute des Amoréens n’est pas encore à son comble ».

Les Amoréens font partie des habitants de Canaan. C’était un peuple idolâtre. Ils pratiquaient les sacrifices d’enfants pour leurs dieux, l’immoralité sexuelle, la prostitution sacrée et la torture. Dieu savait que les peuples de Canaan étaient méchants et que leur méchanceté allait encore s’accroître jusqu’à atteindre son comble. Il attendait que cette méchanceté atteigne son paroxysme  pour juger ce peuple. Le peuple d’Israël n’a pas mené une guerre ethnique contre Canaan. Ce n’était pas un génocide. Le peuple d’Israël a été le moyen que Dieu a utilisé pour juger un peuple qui méritait d’être jugé.

On pense souvent que le jugement est incompatible avec l’amour de Dieu. Mais en réalité, si Dieu est amour, comment imaginer qu’il puisse rester indifférent face à la méchanceté ? Les sacrifices d’enfants, les viols, la torture, la violence gratuite. Si Dieu est amour, alors il déteste le mal et il le punit. Si Dieu est amour, alors il met en œuvre sa justice pour mettre hors d’état de nuire ceux qui répandent la méchanceté à l’extrême. C’est ce qu’il a fait en jugeant les Cananéens, par le moyen du peuple d’Israël.

Ce n’était pas une guerre ethnique motivée par le racisme. Dans l’Ancien Testament, Dieu a sans cesse répété à son peuple qu’il fallait accueillir l’étranger. En Genèse 12 verset 3, Dieu dit à Abraham que toutes les familles de la terre seront bénies par lui. Dans le livre du Lévitique, l’Éternel ordonne qu’Israël témoigne de la solidarité aux étrangers qui vivent parmi eux. Voici ce que nous lisons au chapitre 19 verset 34 : « Vous traiterez l’étranger en séjour parmi vous comme un israélite, comme l’un de vous; vous l’aimerez comme vous-mêmes, car vous avez été étrangers en Égypte. Je suis l’Éternel, votre Dieu. »

Dieu n’incite pas au racisme, au contraire, il incite à la solidarité et à l’amour envers les étrangers.

Dans la généalogie de Jésus, il y a des non-juifs. Par exemple, lorsque les juifs se sont emparés de la ville de Jéricho, ils ont épargné une femme du nom de Rahab, une prostituée étrangère, parce qu’elle avait manifesté sa foi en Dieu. Elle deviendra l’une des ancêtres de Jésus. En résumé, lorsque Dieu demande à son peuple de s’emparer d’une ville comme Jéricho, il accomplit son jugement.

Maintenant il y a trois points très importants à préciser.

(1) Tout d’abord, il est vrai que Dieu a livré les Cananéens aux mains des israélites et que deux villes en particulier ont été complètement détruites : Jéricho et Aï. Mais ces deux villes étaient des campements militaires. Dieu n’a pas ordonné d’attaquer une ville remplie de civils. Vous me direz que le texte biblique précise que tous les êtres vivants sont passés au fil de l’épée : les hommes, les femmes, les vieillards, les enfants et même les animaux. Mais en fait, on sait que lorsque cette formulation est utilisée, c’est une figure de style qui s’appelle l’hyperbole. C’est une manière de raconter les choses en exagérant, non pas pour mentir, mais pour accentuer la victoire.

Par exemple, en langue française, nous avons aussi des hyperboles semblables. Quand les enfants jouent au foot et que leur équipe gagne, il n’est pas rare de les entendre dire : « on les a tous massacrés », « on les a écrabouillés ». Ces enfants ne sont pas cruels ou menteurs. Ils ont simplement raconté leur victoire avec des hyperboles, des expressions.

C’est la même chose lorsque nous lisons que le peuple d’Israël a passé tous les êtres vivants au fil de l’épée, c’est une expression orientale pour parler de victoire militaire. On sait très bien qu’il y a eu des survivants, car le texte biblique en parle.

(2) Le deuxième point à prendre en compte, c’est que le peuple d’Israël a lui-même été jugé par Dieu et Dieu a utilisé les peuples voisins pour accomplir ce jugement. Le nord d’Israël a été attaqué par les Assyriens en 722 av. J.-C. et la population du sud a été attaquée par les Babyloniens en 586 av. J.-C.. Tout le peuple d’Israël s’est retrouvé déporté et exilé chez les peuples qui ont dominé sur eux. Dieu a jugé son peuple à ce moment-là, car il était devenu idolâtre, méchant et hypocrite.

(3) Enfin, le troisième point à préciser c’est que ces jugements ont eu lieu pendant une période précise de l’histoire du peuple d’Israël. Après Jésus-Christ, Dieu n’interviendra plus pour juger les nations, car le jugement aura lieu à la fin des temps. Donc l’enseignement biblique ne doit jamais être un argument pour faire la guerre. Rien dans la Bible ne justifie que l’on fasse la guerre à un autre peuple au nom de Dieu, même si c’est pour soi-disant rendre justice. Dieu lui-même fera justice en temps voulu, nous n’avons pas à intervenir à sa place.

Alors pourquoi le christianisme a été une cause de guerre dans le passé ? On parle par exemple des croisades entre le 11e et le 13e siècle.

Si ce genre de guerre a eu lieu, c’est parce que l’Église officielle s’était éloignée des Écritures. On peut repérer deux erreurs en particulier.

Premièrement, on a confondu l’état et l’Église.

Voici ce que Jésus a dit dans Luc 20.25 : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. »

Autrement dit : séparez l’état et l’Église. Le royaume de Dieu n’est pas de ce monde, donc on ne doit pas chercher à gouverner ce monde comme si tout le monde était chrétien ou comme si on voulait imposer une loi divine sur terre.

Le but des croisades était politique, on a mélangé l’état et l’Église et on a instrumentalisé la foi chrétienne pour partir en guerre.

Deuxièmement, dans l’histoire il y a souvent eu des confusions sur l’idée d’un lieu saint.

Les chrétiens ne devraient pas avoir de lieu saint à défendre par les armes. Voici ce que Jésus a dit en Jean 14.21-24, il répond à une femme qui lui demande où adorer Dieu.

« L’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Vous adorez ce que vous ne connaissez pas; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. Mais l’heure vient, et elle est déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité. En effet, ce sont là les adorateurs que recherche le Père. »

Et nous lisons par ailleurs dans la Bible que le temple de Dieu, c’est nous, c’est son peuple. Dieu n’est pas rattaché à un lieu particulier. Rien ne justifie que l’on use de violence pour rétablir ou établir un lieu saint, comme l’ont fait ceux qui sont partis en croisade. L’Église officielle de l’époque a fait ces erreurs et nous devons condamner ce qui s’est passé. Le fondateur du Christianisme est Jésus, et si nous regardons toute sa vie, il a été pacifique !

Peu avant sa mort, Jésus est entré dans la ville de Jérusalem sur un ânon, signe d’humilité et surtout de pacifisme. Un peu plus tard, quand les gardes romains sont venus l’arrêter, l’apôtre Pierre a sorti son épée. Voici ce que Jésus lui a dit à ce moment précis (Mt 26.52) : « Remets ton épée à sa place, car tous ceux qui prendront l’épée mourront par l’épée. »

Jésus n’a jamais légitimé la violence, même au nom de la justice. Toute sa vie il a été irréprochable.

Voici ce que Jésus a dit à propos des guerres de religion (Jn 16.2-3) : « L’heure vient où tous ceux qui vous feront mourir croiront offrir un culte à Dieu. Ils agiront ainsi parce qu’ils n’ont connu ni le Père ni moi. »

Ceux qui font des guerres au nom de Dieu ne connaissent pas Dieu. Par ailleurs, quand on dit que la religion est la cause principale des guerres dans le monde, c’est faux.

Le 20e siècle a été le siècle le plus sanglant de notre ère. Au 20e siècle, il y a eu plus de personnes tuées que dans les 19 siècles précédents. Les croisades ont fait 3 millions de morts, ce qui est énorme et condamnable. Mais les dictateurs du 20e siècle en ont fait bien plus. La plupart d’entre eux voulaient notamment éradiquer la religion au nom de l’athéisme, et ils ont tué des millions de gens. Hitler a fait 17 millions de victimes, Staline 23 millions et Mao 78 millions. Ce n’étaient pas des guerres de religion, mais des guerres athées. Tous ces massacres n’étaient pas causés par la religion, mais par un éloignement de Dieu. Quand on enlève Dieu, on met forcément autre chose à la place, par exemple sa nation, son ethnie ou l’état.

Pour conclure, j’aimerais vous lire ces paroles que Jésus a prononcées dans son sermon sur la montagne (Mt 5), c’est un extrait de ce que l’on appelle les béatitudes :

3 «Heureux ceux qui reconnaissent leur pauvreté spirituelle, car le royaume des cieux leur appartient!
4 Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés!
5 Heureux ceux qui sont doux, car ils hériteront la terre!
6 Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés!
7 Heureux ceux qui font preuve de bonté, car on aura de la bonté pour eux! 8 Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu! 9 Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu!

Christian Huy

Sources :
Formation RZIM Academy
Le blog de Thimothée Davi : https://timotheedavi.wordpress.com/2015/09/02/la-religion-nest-pas-la-cause-majeure-de-guerres-dans-lhistoire-croyance-populaire-demasquee/

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