La puissance de Dieu en Jésus est toute différente de ce qu’on pense : il sert et il sauve

Prédicatrice : Marie-Eve BOSIGER

Date : dimanche 30 août 2020
Références : Marc 10 : 35 - 45

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Ce chapitre 10 de Marc est riche d’enseignements percutants comme Jésus sait les faire ! Jésus se trouve en Judée et il enseigne les foules. Il répond aux questions des pharisiens, puis de ses disciples, sur la séparation dans le couple et l’adultère. Il montre un désir d’être en relation avec les enfants, les prenant même de manière surprenante en exemple pour ceux qui voudraient participer au royaume de Dieu. Puis un homme riche vient questionner Jésus sur ce qu’il doit faire pour hériter la vie éternelle, lui qui a fait tout ce que la loi enseigne. Jésus éclaire cet homme sur ce qui exerce de l’emprise sur son cœur, sa richesse. Malgré cet éclairage, l’homme s’assombrit et s’en va tout triste.

Le contexte

Les disciples sont effrayés à l’écoute des paroles de Jésus parce qu’elles révèlent la difficulté, l’impossibilité aux hommes d’entrer dans le royaume de Dieu. Mais Jésus insiste sur cette difficulté pour montrer que Dieu accomplit ce qui pour les hommes est impossible.

Finalement, sur le chemin de Jérusalem, Jésus annonce à ses disciples toujours effrayés, pour la 3e fois qu’il va mourir et qu’il se relèvera de la mort.

La question qui tue

C’est là, sur ce chemin, que deux des disciples, Jacques et Jean, deux frères, viennent poser à Jésus une question brûlante ! « Maître, nous voudrions que tu fasses pour nous ce que nous te demanderons. » Je m’arrête déjà sur cette première phrase qui ouvre le dialogue parce qu’elle me semble d’emblée nous saisir en faisant écho à nos propres dialogues avec Jésus.

Il y a une incohérence profonde dans la formulation de la demande, une incohérence qui nous renvoie que nous tous sommes des êtres pleins de contradictions. Les disciples appellent Jésus « maître », ils semblent donc être dans une position de soumission établie, soumission à ce que ce maître leur enseigne depuis le début de leur rencontre. Et pourtant, leur désir est si fort qu’ils passent en l’espace de quelques mots dans la même phrase, en quelques dixièmes de seconde, à une position de supériorité en espérant diriger la conduite de leur maître !

Jésus n’entre pas dans leur jeu qui ressemble drôlement à un début de chantage. Jésus n’est clairement pas soucieux de caresser ses disciples dans le sens du poil pour les garder près de lui. Il ne leur dit absolument pas ce qu’ils ont envie d’entendre et même quand ils sont effrayés, il insiste sur ce qui les effraie pour leur faire comprendre son enseignement : comme quand il leur dit un peu plus tôt aux vv. 23-24 qu’il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu !

Jésus n’exerce aucune emprise sur ses disciples. Il a confiance qu’une puissance divine agit à travers lui et ses paroles pour les nourrir, les éclairer, leur révéler des choses essentielles en dépit du fait que les disciples donnent l’impression de ne jamais rien comprendre (Mc insiste beaucoup sur cette incompréhension des disciples tant qu’ils ne se trouvent pas confrontés à la croix).

Jacques et Jean sont invités à préciser leur demande avant d’avoir une réponse. C’est ce qu’ils font. « Donne-nous de nous asseoir l’un à ta droite et l’autre à ta gauche dans ta gloire. » On comprend qu’ils ont fait leurs plans ! Pour venir à deux demander une chose, ils ont déjà dû se mettre d’accord avant (pas toujours évident entre frères !) et puis ils ont dû réfléchir à la façon de présenter la demande délicate (dans Mt 20,20-28, c’est leur mère qui fait cette même demande à Jésus).

Jésus leur fait comprendre qu’ils n’ont toujours pas saisi le sens de ce qui arrive, de ce qui l’attend déjà lui (et quelle gloire !) mais aussi eux en tant que disciples. Il y a des choses que Jésus sait d’avance et qu’il leur annonce ici : qu’ils boiront la même coupe que lui et qu’ils recevront le même baptême que lui. Mais il y a aussi des choses qu’il sait d’avance et qu’il laisse mystérieuses quant à savoir qui sera à sa ses côtés quand il sera glorifié. Nous le savons, il sera ironiquement entouré de brigands alors que ses disciples auront fui.

Jacques et Jean font preuve d’un aveuglement sur eux-mêmes, quand ils répondent presque du tac au tac à Jésus qui leur demande « Pouvez-vous boire la coupe que moi je bois ou recevoir le baptême que moi je reçois ? », « Nous le pouvons. ». Aucun doute là-dessus ! Il y a un refus catégorique d’envisager la faiblesse, un déni profond après tout ce qu’ils ont fait pour suivre Jésus. Pierre disait quelques versets auparavant : « Nous, nous avons tout quitté pour te suivre. »

La zizanie

Et voilà que les dix autres disciples s’en mêlent, Jacques et Jean ont semé la zizanie avec leur désir de supériorité, c’est la jalousie qui s’exprime dans toute sa splendeur. Evidemment la tension monte parce que tout être humain est habité par ce désir profond de dominer l’autre, d’être le meilleur. Jésus les appelle pour leur réexpliquer une chose qu’il leur avait déjà dite au v. 31 « Beaucoup de premiers seront derniers et les derniers seront premiers. »

Ce fameux paradoxe revient sans arrêt dans la bouche de Jésus : v.43 « quiconque veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur ; et quiconque veut être le premier parmi vous sera l’esclave de tous ». Ou dit autrement à d’autres occasions : Mt 23,12 : « Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Qui s’élèvera sera abaissé et qui s’abaissera sera élevé. » Ici, Jésus présente cette attitude en opposition avec ce qu’il se passe dans le monde des dirigeants. « Vous savez que… » « Il n’en est pas de même parmi vous. Au contraire, … »

Il s’agit de comprendre qu’il y a une forte opposition entre ce qui se voit et ce qui se vit, l’apparence et la réalité, ce qui est en surface et en profondeur. Une opposition aussi entre la façon dont les relations se vivent dans le monde et celle dont les relations se vivent quand on est disciple du Christ. L’explication de ce paradoxe est Jésus lui-même (« Car ») : l’expression « le fils de l’homme » permet de l’identifier comme le messie annoncé par les prophètes Ezechiel et Daniel, lui le messie n’est « pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude ».

Cette déclaration de Jésus clôt la dispute. Nous ne savons rien de la réaction des disciples. Sont-ils rassurés ou encore plus effrayés ? Les explications de Jésus sont-elles suffisantes pour calmer les tensions jalouses entre eux ? Nous ne savons pas. Mais si les paroles de Jésus s’arrêtent là c’est que lui n’a rien de plus à ajouter. Pour lui, c’est suffisant pour faire cheminer les disciples vers un peu moins d’aveuglement.

D’ailleurs, la suite du récit se trouve dans un autre lieu, à Jéricho où Jésus va justement guérir un aveugle Bartimée qui lui demande de lui redonner la vue. Jésus lui dira : « Va, ta foi t’a sauvé. » Et Bartimée guéri se mettra directement à le suivre.

Et pour nous ?

Que nous renvoie cet épisode de la vie de Jésus et de ses disciples ? Plusieurs choses.

  • Bien que nous reconnaissions Jésus comme notre « maître », nous avons tendance comme Jacques et Jean à vouloir le diriger dans nos plans plutôt que d’être dirigés dans les siens.

Nous avons besoin de prendre conscience de ce réflexe, de l’admettre, pour ensuite demander à Dieu de nous aider à inverser cette tendance. Jacques et Jean vont jusqu’à formuler une demande précise qui montre qu’ils font leur plan pour assurer leur avenir glorieux et ils invitent Jésus à faire ce qu’il faut pour le réaliser. Et nous, sommes-nous prêts à lâcher prise sur notre avenir (glorieux ou misérable) et laisser Dieu prononcer le mot final sur ce qu’il adviendra de nous ? Lui faisons-nous confiance dans ce qu’il a prévu pour chacun ?

  • Parmi les disciples de Jésus que nous sommes, de quelle façon vivons-nous des relations les uns avec les autres ? Sommes-nous dans des rapports de supériorité, de domination ? Cela réveille-t-il des tensions jalouses ? Ou bien en est-il tout autrement parmi nous, comme Jésus le dit à ses disciples ? Sommes-nous au contraire serviteurs les uns des autres ?

Ex : Il y a une situation que rencontrent toutes les églises, qu’elles soient petites ou grandes, en ville ou à la campagne, en France ou en Australie, c’est la difficulté à trouver des personnes qui s’engagent à faire le ménage régulièrement pour avoir des locaux propres. Ce qui est devenu plus que nécessaire dans les temps actuels d’épidémie. C’est un service complètement dévalorisé, une tâche ingrate, et si difficile à faire qu’on ne la fait que quand on y est obligé après une activité qui a tellement sali les locaux qu’on ne peut pas faire autrement que de rester plus longtemps pour nettoyer.

Quel service me donne envie, quel service est nécessaire, dans quel service je m’abaisse, et dans quel service je m’élève ?

Etre l’esclave de tous, ça n’a jamais séduit personne et pourtant c’est ce qui arrive à celui qui veut être le premier, le plus grand, celui qui s’élève. Mais celui qui s’abaissera sera élevé.

Jésus s’est abaissé dans le service et dans le fait de perdre sa vie pour que d’autres soient délivrés du péché. Nous tous rassemblés ici, nous vivons au bénéfice de cette délivrance, suivons donc l’exemple de celui que nous voulons appeler Maître avec sincérité et en vérité. Chantons ce chant si beau qui redit ce que Jésus a fait en venant jusqu’à nous pour nous servir !

Chant final : Tu es venu jusqu’à nous (JEM 2)

Conclusion, bénédiction : 1 P 4,10 « Que chacun mette au service des autres le don qu’il a reçu de la grâce ; vous serez ainsi de bons intendants de la grâce si diverse de Dieu. »

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